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[Article] Poissons : une douleur bien réelle

MessagePosté: Mar 18 Nov 2014 22:58
par LaureO
Bonjour tout le monde, voici un petite traduction de synthèse d'un article scientifique, accompagnée de quelques réflexions.


Une douleur bien réelle :

Vous êtes sceptique face à la douleur ressentie par un cochon, une poule, un poisson ?
 Pourtant, ce sont des êtres sentients.

D'une étude scientifique sur la douleur chez les poissons..

Une étude de 2003 de l'intitut Roslin a étudié rigoureusement la perception de la douleur chez des truites arc-en-ciel. Les chercheurs ont testé deux lots de truites auxquelles ils ont administré soit une substance inoffensive (contrôle), soit une substance nocive.

Après avoir reçu une injection de substance nocive dans les lèvres, les truites ont montré un comportement anormal : se balancer sur les nageoires pectorales, se frotter les lèvres dans le gravier ou contre les bords de l'aquarium. Ces truites ventilaient plus vite (augmentation du taux de leur battement operculaire). Quand on leur donnait de l'antalgique, les comportements liés à la douleur diminuaient. Les chercheurs ont conclus que les comportement liés à la douleur ne sont pas des simples réflexes.
 
Si même les poissons, des animaux très éloignés de nous (phylogénétiquement parlant), ressentent la douleur, comment oser douter de celle d'oiseaux et mammifères?
 
Si vous lisez l'anglais :
L'abstract de l'article.
Localisation des récepteurs de la douleur [ici]


...Aux conclusions logiques à en tirer

Maintenant qu'il est rigoureusement établi que les poissons ressentent la douleur, comment justifier certaines pratiques, pourtant totalement banalisées?
 Par exemple, comment soutenir que la pêche est acceptable alors que les poissons sont découpés vivants, ce qu'on n'accepterait pas pour les Vertébrés terrestres mais qui est banalisé chez les animaux marins. Le nombre de poissons tués par l'industrie de la pêche n'est même pas comptabilisé. On raisonne en tonnage plutôt qu'en individu. Pratique pour éviter de penser au fait que les milliard d'animaux remontés dans les filets, la vessie sortant par la bouche à cause de la pression, soient des animaux sentients.

Les poissons sont des être sensibles, et même si ils ne crient pas leur douleur ne doit plus désormais être ignorées.

Parmi les Vertébrés, ce sont les poissons qui ont le plus souffert d’une conception erronée de l’échelle de l’évolution. Au cours des dernières décennies, cependant, cette erreur a commencé à être corrigée. Nous nous rendons compte maintenant que, comme le reste des vertébrés, les poissons présentent un riche éventail de comportements complexes et que l’apprentissage joue un rôle central dans le développement de leur comportement.


Expériences sur les animaux, quelles limites ?
Ces études ne sont pas les plus sympathiques du monde pour les poissons en question, qui sont volontairement maltraités pour démontrer leur perception de la douleur.
D'un point de vu éthique, je suis assez partagée par rapport à ce type d'expérience.
Ce genre d'étude est important dans la compréhension des autres animaux, et la prise en compte de leurs intérêts. (Selon la thèse développé par Peter Singer dans la Libération animale (Animal Liberation), un être capable de ressentir de la souffrance ou du plaisir est un être sensible, qui a intérêt à vivre.)

Cependant, comment avancer en science fondamentale sans souffrance et privation de liberté ?
On dispose maintenant de techniques sophisitiquées (Imagerie Radiation Medicale, etc..) qui permettent de visualiser les zones du cerveau actives pendant une tâche précise, et ainsi d'éviter les expériences intrusives. Le challenge est de définir un protocole assez judicieux pour tester différentes questions fondamentales (cognition, mémorisation, conscience de soi, empathie..).
Qu'en pensez-vous?

Remarque : On ne peut utiliser des humains pour des expériences de vivisection depuis le code de Nuremberg..(encore heureux me direz vous!) Sauf cas d'extrème urgence (comme actuellement avec l'épidémie du virus Ebola)..
A quand une loi éthique pour mieux protéger d'autres êtres sentients des expérimentations ?
 
Science sans conscience n'est que ruine de l'âme - Rabelais


N'hésitez à poser des questions ou critiquer ^^

Re: Poissons : une douleur bien réelle

MessagePosté: Mer 19 Nov 2014 01:49
par Elodie
Coucou, merci d'avoir partagé cela, je connaissais déjà l'étude dont tu parles... :p

Je trouve délicat, scientifiquement parlant, de tirer des conclusions en se basant sur une seule étude :p Mais je reste d'accord avec toi pour le fond, on s'entend :)

D'ailleurs, il y a des études plus récentes qui ont été réalisées sur ce sujet-là (que je n'ai pas lues)
voir ici. Mais il y en a assez peu (ce qui est une chance pour les poissons, on s'entend).

Pierre Sigler avait rédigé sur le Huffingtonpost deux articles sur l'intelligence des poissons, je ne sais pas si tu avais vu, et avait fait une présentation sur ce sujet aux Estivales.

Sinon, qui parle aussi de la souffrance des poissons (mais aussi des capacités cognitives :p) et de la pêche, une brochure vraiment super intéressante : Poisson le carnage (en vente dans la boutique de L214). La brochure aborde aussi le problème des poissons de "compagnie" (aquarium), c'est vraiment une vie misérable et de souffrance (ils sont très sensibles à la lumière, au bruit, vibrations, changements de température, etc.) Et un poisson en aquarium signifie des tas de poissons tués (lors de la pêche, des transports, stresse, etc).

Un extrait d'un docu sur la pêche qui critique la pêche... en axant sur les poissons en tant qu'être sentient. A partager sans modération !


Imagerie Radiation Medicale


C'est plutôt IRM comme... Imagerie par Résonance Magnétique :p et c'est un "ancêtre" de l'Imagerie par Résonance Magnétique fonctionnel [ptite liste de méthodes en neuropsy avec leurs limites). Mais je me demande à quel point ce genre de technique est adaptée pour des ... poissons. As-tu vu des études sur le sujet utilisant des animaux avec ces techniques ?

Les humains en règle générale sont tenus de ne pas bouger.... Et immobiliser un poisson pose aussi un problème éthique (un poisson peut paniquer, ressentir du stresse (donc ajouter des variables qui peuvent en outre fausser les résultats) alors qu'un humain, on peut lui expliquer et obtenir un consentement libre, qui est d'ailleurs une base de la déontologie...).

Toutefois, les "techniques sophistiquées" ne fond pas l'unanimité et les critiques sont à prendre en considération.

Sinon, chez les humains aussi y'a pas mal de dérives et de pratiques dégueux en matière d'éthique (dans les pays occidentaux y'a ds comités d'éthiques que d'ailleurs les chercheurs n'apprécient guère pour les lourdes procédures). Mais... dans certains pays pas de comité d'éthique => humains exploités par des chercheurs, voir à ce sujet cette conférence de TED d'une africaine qui parle d'une victime des recherches sur le VIH. Voilà, juste pour info et aller contre l'idée selon laquelle ya pas de soucis avec les humains.

Mais c'est sûr que du côté des animaux, on peut souvent se demander la nécessité de telle ou telle recherche... comme celle-ci :


Pour moi, en recherche fondamentale, l'abolition de l'expérimentation animale (&humaine) ne m'apparaît pas comme une solution convaincante. Je trouve que ça serait aller contre des progrès scientifiques (pouvant apporter des bénéfices) que d'en exiger l'abrogation pure et simple.

Mais dans un monde antispéciste utilitariste, les chercheurs seraient véganes et convaincus quant aux problèmes moraux à faire souffrir des animaux ce qui laisserait envisager des recherches moins injustes (espaces satisfaisants, animaux sociaux avec d'autres congénères, soins, nouvelle vie dans des refuges, bénéfices / risques rigoureusement pesés...). Et idem pour les humains. Mais ce pose encore les problèmes au niveau du consentement, etc. Et de la nécessité, des probables pertes en n'expérimentant pas... Un sujet bien chaud bouillant en tout cas !

Re: Poissons : une douleur bien réelle

MessagePosté: Ven 21 Nov 2014 20:15
par LaureO
Coucou, merci pour ta réponse qui apporte beaucoup d'infos.

J'aurais dû faire une petite revue biblio avant d'écrire, je n'avais pas du tout entendu parler de Pierre Sigler avant cette semaine !
En plus, effectivement, se baser sur une étude n'est pas le plus rigoureux du monde, je vais lire les autres pour voir les corrélations, ou les différences (entres espèces, entre discussions, ccl tirées..). C'est juste qu'en tombant sur l'article, il m'a semblé 'sensationnel' sur le moment ^^'

C'est super qu'un documentaire mettant en lumière la souffrance des poissons ait été diffusé à la TV !

C'est plutôt IRM comme... Imagerie par Résonance Magnétique :p et c'est un "ancêtre" de l'Imagerie par Résonance Magnétique fonctionnel [ptite liste de méthodes en neuropsy avec leurs limites). Mais je me demande à quel point ce genre de technique est adaptée pour des ... poissons. As-tu vu des études sur le sujet utilisant des animaux avec ces techniques ?

Les humains en règle générale sont tenus de ne pas bouger.... Et immobiliser un poisson pose aussi un problème éthique (un poisson peut paniquer, ressentir du stress (donc ajouter des variables qui peuvent en outre fausser les résultats) alors qu'un humain, on peut lui expliquer et obtenir un consentement libre, qui est d'ailleurs une base de la déontologie...).


Oups, étourderie :P

En fait j'envisageais plutôt cette partie comme une ouverture sur tous les "modèles animaux utilisés" dans les labos, en particulier les Mammifères (Rongeurs et Primates étant massivement utilisés pour la recherche fondamentale) ou les Oiseaux (endormi? certaines espèces très mobiles seraient stressées, c'est sûr..). Je pensais à des expériences non invasives avec des animaux de companie (un peu comme les enfants qui viennent avec leurs parents, faire des jeux, et ne réalisent pas les enjeux de l'étude). Par exemple un chien a un IRMf pendant qu'il réalise un jeu (tâche cognitive définie scientifiquement) et on visualise les réseaux neuronaux impliqués…

Toutefois, les "techniques sophistiquées" ne fond pas l'unanimité et les critiques sont à prendre en considération.  

Effectivement, il faut prendre du recul par rapport aux études menées, à leurs aboutissement et à ce qu'elles impliquent réellement, et ne pas s'engouffrer dans la brèche pour reproduire le même type d'expérience à grande échelle si les résultats ne sont pas en réalité aussi probants que ceux escomptés.

Je ne pensais pas que des études sur la cognition des poissons avaient été réalisées, (d'ailleurs la synthèse de P. Sigler est édifiante !).

En ce qui concerne l'aspect neurobiologie, et la présence d'une conscience chez les animaux, Sebastien Arsac a écrit un article paru dans les Cahiers Antispécistes (tu l'as sans doute déjà lu ^^ ), à partir des publications du neurobiologiste Antonio Domasio.
D'ailleurs, ce dernier a donné une conférence TED, « la quête pour comprendre la conscience » dans laquelle il développe vers la fin que la conscience est présente chez de nombreuses espèces.

Je pense que l'éthique devrait être une des composantes essentielles de toutes les expérimentations. C'est sûr que des expériences comme celle que tu montres n'a pas vraiment de raison d'être, et est juste irrespectueuse et injuste…

Mais heureusement, on peut (un peu) faire évoluer les choses. Lori Marino est une chercheuse militante, et a beaucoup publié sur les dauphins. Elle fait partie du Non Human Rights Project, et évoque par exemple évoque les expérimentations consenties sur des animaux dans des refuges, avec des protocoles rigoureux pour explorer leur cognition.

Je partage pas mal ton point de vu.

Re: Poissons : une douleur bien réelle

MessagePosté: Ven 21 Nov 2014 20:19
par Elodie
LaureO a écrit:En ce qui concerne l'aspect neurobiologie, et la présence d'une conscience chez les animaux, Sebastien Arsac a écrit un article paru dans les Cahiers Antispécistes (tu l'as sans doute déjà lu ^^ ), à partir des publications du neurobiologiste Antonio Domasio.
D'ailleurs, ce dernier a donné une conférence TED, « la quête pour comprendre la conscience » dans laquelle il développe vers la fin que la conscience est présente chez de nombreuses espèces.


Oui j'ai déjà vu et lu tout ça :-)
Dès que tu tombes sur d'autres découvertes, n'hésite pas à les partager, moi ça m'intéresse toujours ;)